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[critique] Léonie Bischoff – Anaïs Nin : Sur la mer des mensonges

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Se saisir de l’oeuvre d’Anaïs Nin, écrivaine américaine du XXe siècle, n’était pas chose facile. Ladite oeuvre en effet pléthorique et polymorphe, entre tomes de journal « officiel », volumes du journal non expurgé, textes d’autofiction et nouvelles érotiques. Elle est aussi, et surtout, tout sauf politiquement correcte. Certes, la vie d’Anaïs Nin illustre la liberté féminine ; mais c’est aussi celle d’une femme mariée, entretenue par son mari banquier, qui tient à son confort de vie. Certes, sa destinée est celle d’une femme de lettres qui s’émancipe par l’écriture et par la sexualité (voire les deux en même temps, à travers les textes érotiques) mais c’est aussi une menteuse et une séductrice compulsive, dont le comportement confine à la mythomanie et à la nymphomanie. C’est une femme qui aime tant les hommes que les femmes, mais c’est aussi une jeune fille qui se laisse faire face aux agressions, marquée par un climat d’inceste et qui, une fois adulte, prendra plaisir à coucher avec son père. C’est une femme qui écrit mais c’est aussi une femme qui avorte à 5 mois en estimant qu’elle ne peut à la fois écrire et être mère, suivant une alternative que d’aucuns et d’aucunes trouvent inacceptable aujourd’hui. C’est une grande amoureuse, qui se présente comme dévouée et généreuse, mais qui trompe chacun avec tous et tous avec chacun. C’est une passionnée de vérité mais qui couche avec ses analystes, le Dr Allendy puis le Dr Rank. Certains pensent qu’elle est folle, et l’était sans doute un peu, mais de cette folie qui flirte avec la limite et qui parvient toujours à la sublimation.

Ce que j’en ai retenu pour moi-même, lorsque j’a tout lu d’elle, de mes 16 à mes 19 ans, c’est cette liberté folle car absolue, cette plasticité de la narration et de la vérité, et cet instinct qu’il y a dans l’écriture diariste une forme éminente de l’écriture de soi, de l’écriture tout court. La littérature ne considère pas encore le journal intime comme un genre littéraire à part entière : c’est une erreur. Une fois l’erreur dissipée, l’oeuvre d’Anaïs Nin gagnera ses lettres de noblesse. D’ici là, des ouvrages comme celui, subtil, délicat, de Léonie Bischoff aidera ceux qui hésitent au seuil de l’oeuvre à passer le pas, à y entrer, et à plonger dans la mer des mensonges, car de la fiction.

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[critique] Florence Porcel, Pandorini

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Pandorini est un roman à clés, mais ce n’est pas ce qu’il y a de plus intéressant dans ce livre. C’est un ouvrage de plus sur les abus sexuels dans un milieu de pouvoir, et d’aucuns crient à la lassitude, à la répétition – mais ce n’est pas l’ouvrage de trop. En transposant l’intrigue du milieu des grands médias à celui du cinéma, l’actrice déguise quelque peu la réalité pour mieux en souligner l’universelle vérité : d’où qu’elles se trament, les ficelles de l’agresse sexuelle sont toujours les mêmes (cf l’illustration de couverture).

La victime est jeune, naïve et, c’est là sa faille, atteinte du syndrome de Cendrillon : elle pense que l’amour peut se construire sur un coup de foudre et qu’une carrière dans le cinéma, aussi. Il faut dire que les success stories célébrant les débuts de carrière tonitruants de ceux qui sont « repérés » du jour au lendemain confortent cette illusion. Et même chose pour les Rom com qui déclinent à l’envi le mythe du premier regard foudroyant.

Le coupable est mûr, installé dans une position de pouvoir et, c’est là son vice, atteint du syndrome du Don Juan : il consomme les conquêtes pour mieux redorer son image ; et, au rythme où va la dévoration, la faille narcissique est énorme. Elle se conjugue avec un manque absolu d’empathie pour ses conquêtes, qui ne sont que des proies. Tous les moyens sont bons pour les enchaîner : la flatterie, la fausse promesse, l’entrée par surprise dans l’intimité (par la conversation d’abord, par les actes ensuite), l’insistance, le brouillage de discours entre sexe et amour, l’abandon sans un mot.

Sonnée par une première relation brutale, la jeune femme en vient à développer un syndrome de Stockholm qui lui fait rechercher ce qu’elle devrait fuir pour échapper à son propre sentiment de culpabilité. Puisque je choisis aujourd’hui, c’est que j’ai choisi hier : rien de mal ne s’est donc passé et le mensonge n’en est pas un.

La force et l’intérêt de l’ouvrage de Florence Porcel est de décrire et de décrypter avec un sens aigu de l’analyse et de l’introspection les ressorts des actions de chacun de ses personnages. Il est aussi d’intercaler passages de récits et parodies (d’une ironie mordante) de formats journalistiques (articles de presse écrite, interview radio, interview télé, posts sur les réseaux sociaux) pour faire entendre le choeur dissonant des voix qui s’opposent sur l’agora et pour faire taire, par avance, les arguments des partisans de la culture du viol. Une lecture édifiante et éclairante, dont l’intérêt est loin de se réduire aux révélations qui l’accompagnent.

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(club) Radium girls – Vidéos

Un format court a été consacré aux Radium girls sur France Culture :

Un film est aussi en préparation :

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[actualités] Vidéo – « Sculptrices, ni muses ni modèles » sur arte.tv et educarte.tv

Un documentaire diffusé sur Arte récemment sur la place des sculptrices dans l’histoire de l’art :

https://replay.orange.fr/groups/ATE1583516167SCULP/videos?categoryId=000-064-040&channelId=catchuptv_arte