Je trouve The Age of Innocence particulièrement représentatif de l’idée que nous avions en ouvrant ce bookclub : examiner quel rôle la société accorde aux femmes, en particulier la société anglo-saxonne. Or ce roman indique une scission au sein de ce monde anglo-saxon : d’un côté l’Europe, de l’autre le Nouveau Monde – l’Europe étant désignée comme un lieu où les mœurs seraient plus libres et plus scandaleuses que les Etats-Unis, où prime le puritanisme. J’avais plutôt tendance à distinguer, pour ma part, au sein de l’Europe, les nations comme la France dans lesquelles la production littéraire féminine est assez faible (au XIXème s émergent seulement George Sand et Mme de Staël) de l’Angleterre qui compte beaucoup plus de femmes écrivains (les trois sœurs Brontë, Virginia Woolf, Mary Shelley, George Eliot, Burnett, Agatha Christie, E. B. Browning etc…). Du côté des Etats-Unis (et pour nous limiter à notre programme de lecture) on trouve Alcott, Dickinson, Wharton (mais il y en aurait d’autres). Pour ce qui est du droit que s’accordent les femmes à écrire, l’Angleterre semble donc être la plus avancée. – Pensons également au mouvement des suffragettes, né avec virulence outre-Manche, quand la revendication d’Olympe de Gouges à ce que soient reconnus les droits de la citoyenne (et pas seulement du citoyen) pendant la Révolution Française a été considérée comme marginale et peu porteuse. Il a fallu attendre le XXème s pour que la France écoute ses féministes, à travers la figure de Simone de Beauvoir (pourtant laissée dans l’ombre de Sartre..).
[Il serait à ce titre intéressant de comparer, à la même époque, la réception des idées de Mary Wollstonecraft et de celles d’Olympe de Gouges. Je me demande si la tradition « libertine » de la France du XVIIIème s n’y est pas pour quelque chose : car la femme y est réduite à son pouvoir de séduction et à son désir sexuel (même si, notamment chez Sade, elle n’est pas vue seulement comme objet mais bien comme sujet de (son) désir). ]
Nous avons donc tendance à opposer la culture francophone au monde anglo-saxon, alors que Wharton met dos à dos Europe et Nouveau Monde, l’Europe étant censée être plus libérée que le Nouveau Monde, tant au niveau des mœurs que de l’accès des femmes à la culture (au dernier chapitre, Newland imagine la vie qu’a du mener Ellen et la voit au milieu de conversations brillantes, visitant des musées etc). L’Europe correspond ainsi à un idéal de vie artiste et libre, cultivée et raffinée – mais qui court le risque de la dépravation et du scandale. Le Nouveau Monde, lui, est caractérisé par le sens du devoir, à un point tel que cela me fait penser aux héros généreux de Corneille, choisissant le devoir plutôt que l’amour et le bonheur.
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